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Jour de Visites

SYNOPSIS :

C’est le jour des visites pour le médecin du Roi Louis XIV. Durant cette journée il va rencontrer Molière, le Roi et La Fontaine et pas forcément pour raisons médicales.

PERSONNAGES (X18) :

Molière, Armande, Le Médecin, Catherine, Louis, Le Valet, Louis XIV, Le Barbier, La Servante, Le Grand Maître de la garde-robe, De Louvois, Colbert, Vauban, La Reine, La Fontaine, Bernier, La Duchesse du Bouillon, Boileau

DECORS :

Une scène de théâtre

La Chambre royale et le bureau du Roi

Le Salon de La Comtesse du Bouillon

PIECE EN VI ACTES

DUREE : 1h

ACTE I

PERSONNAGES : Molière, Armande Béjart, Le médecin, Charles Varlet

Musique :

(La scène s’ouvre sur Molière et Armande qui répètent la scène de la dispute du Médecin Malgré Lui)

Molière :

(En colère)

Non je te dis que je n’en veux rien faire, et que c’est à moi de parler et d’être le maître.

Armande :

(En criant)

Et je te dis, moi, que je veux que tu vives à ma fantaisie et je ne me suis point mariée avec toi pour souffrir tes fredaines.

Molière :

O la grande fatigue que d’avoir une femme ! Et qu’Aristote a bien raison quand il dit qu’une femme et pire qu’un démon !

Armande :

Voyez un peu l’habile homme avec son benêt d’Aristote.

(Le médecin entre sur scène en entendant la dispute)

Le Médecin :

Houlà, houlà, il me semble que je n’arrive pas à point nommé.

(Il fait demi-tour et s’apprête à sortir de scène)

Je repasserai plus tard.

Molière :

Au contraire, je vous attendais.

Ne vous inquiétez pas, il ne s’agit que d’une scène.

Le Médecin :

Ça pour une scène, c’est une sacrée scène de ménage

Armande :

Vous n’y êtes pas, nous répétons une scène de la prochaine pièce de théâtre de Monsieur Molière.

Le Médecin :

Hé bien permettez-moi de vous féliciter, c’est tellement bien joué que j’y ai cru.

Armande :

Merci mais il nous faut encore la travailler.

Le Médecin :

Alors qu’est-ce qu’il lui arrive au Molière ?

Soucis pulmonaires, problème d’artères ?

Molière :

Rien de tout cela, je vous ai fait venir pour une toute autre raison.

Le Médecin :

Vous m’intriguez

Molière :

C’est au sujet de ma nouvelle pièce.

Elle débute par une dispute entre un mari qui se nomme Sganarelle et sa femme qui s’appelle Martine.

Le Médecin :

Ça je l’ai vu oui ou plutôt je l’ai entendu.

Molière :

Sganarelle est bûcheron et Martine lui reproche de dépenser tout leur argent et de passer son temps à jouer et à boire.

A la fin de la dispute le mari bat sa femme.

Le Médecin :

Tout ceci me paraît normal.

Je ne vois toujours pas le fait de ma présence ici.

Molière :

Patience j’y viens.

Pour se venger des coups reçus, Martine fait croire à deux autres personnages de ma pièce que Sganarelle est médecin.

Le Médecin :

Ah d’accord, et vous voudriez que je joue le rôle de ce Gargamel !

Armande :

Pas du tout, c’est Molière qui joue le rôle de Sganarelle dans la pièce.

Le Médecin :

J’aime mieux ça, car entre nous je ne crois pas être doué pour jouer la comédie.

Molière :

Ne soyez pas modeste, pour être le premier médecin du Roi, il faut être un excellent acteur, j’en suis sûr.

Mais là n’est pas le propos.

Si je vous ai fait venir c’est pour me dire comment un bûcheron peut arriver à se faire passer pour un médecin ?

Le Médecin :

Un bûcheron en médecin ! L’imposture me semble difficile à dissimuler, il faut m’en dire plus.

Molière :

Il va devoir soigner la fille de Géronte, un autre personnage de la pièce.

Le Médecin :

Et de quels maux souffre-t-elle ?

Molière :

Elle est devenue muette.

Le Médecin :

D’un point de vue médical, une personne est muette du fait qu’elle a perdu l’usage de la parole.

Molière :

En fait, elle feint d’être muette car elle refuse de se marier contre son gré.

Le Médecin :

Entre nous, qu’une femme soit muette, c’est peut-être une maladie mais c’est surtout une chance pour son mari, vous ne croyez pas ?

Armande :

(Vexée) Je vous remercie.

Molière :

Il plaisante…cependant je note la remarque, elle pourra me servir (Il note avec une plume sur une feuille posée sur une table).

Le Médecin :

Bien sûr que je plaisante Armande…

C’est de l’humour ma grande.

Molière :

Je voudrais savoir comment Sganarelle doit se comporter pour se faire passer pour un médecin auprès de Géronte.

Le Médecin :

Pour qu’un bûcheron se fasse passer pour un médecin, il faut que Géronte soit naïf, très naïf.

Molière :

Il le sera !

Le Médecin :

Il faudrait tout d’abord que Gamelle porte des habits dignes de sa fonction, comme une robe par exemple.

Molière :

C’est noté, une robe pour SGA NA RELLE !

Le Médecin :

Il faudrait aussi qu’il parle latin, cela rendrait mortadelle plus crédible.

Molière :

(Agacé) Sganarelle, il s’appelle Sganarelle !

Des notions de latin, voilà qui est intéressant !

Lesquelles par exemple ?

Vous devez en connaître.

Le Médecin :

(Embarrassé)

Bien sûr que j’en connais…heu…par exemple…

Veni, vidi, vici.

Molière :

Parfait (Il note) et ça veut dire quoi exactement ?

Le Médecin :

Heu…Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu.

Molière :

Quel rapport avec la médecine ?

Le Médecin :

(Hésitant)

Heu…le médecin est venu, il a vu le malade et heu…il a vaincu la maladie.

Molière :

Pourriez-vous me citer une autre expression latine ayant un réel rapport avec la médecine ?

Le Médecin :

Oui bien sûr (Il réfléchit) heu…Errare humanum est.

Molière :

(Il note) Très bien…et ça veut dire quoi ?

Le Médecin :

L’erreur est humaine

Molière :

L’erreur est humaine !!?

Moi je dirais que souvent l’erreur est médicale !

Le Médecin : 

On n’est pas à l’abri d’une petite erreur de diagnostic en effet.

Cela peut arriver parfois, mais c’est très rare.

Très peu de patients se plaignent, je vous rassure.

Molière :

Et pour cause, on n’a jamais vu un mort se plaindre du médecin qui l’a tué !

Armande :

Ce n’est pas faux.

Molière :

Armande, allez chercher Catherine et Louis.

Nous allons profiter de la présence du médecin pour travailler certaines scènes de l’acte II.

Armande :

Très bien, j’y vais. (Elle sort de scène)

(Catherine entre sur scène)

Molière :

Catherine vous voilà, nous vous attendions.

Catherine :

Excusez-moi pour le retard.

Molière 

Ce n’est pas grave.

Louis n’est pas encore arrivé.

(En s’adressant au Médecin)

Catherine est la comédienne qui joue le rôle de Lucinde, la fille de Géronte dans la pièce.

Le Médecin : 

Mes hommages

Catherine :

Monsieur. (Elle se met à tousser)

Le Médecin :

Mais que vous arrive-t-il mon amie ?

(Il s’approche de Lucinde) le teint blafard, l’œil vitreux…montrez-moi votre langue ! (Lucinde tire la langue) elle est plus chargée qu’une mule !

Cela sent l’infection.  

Catherine :  

C’est vrai que je ne suis pas très en forme aujourd’hui.

Mais qui êtes-vous ? Un comédien ? 

Molière :      

Presque ! C’est un médecin, le médecin du Roi.

Le Médecin :

Il faudrait peut-être songer à faire une petite saignée ou une petite purge pour vous ragaillardir.

Molière :

Vous verrez cela plus tard, je vous ai fait venir pour ma pièce, pas pour une consultation.

Le Médecin :

Comme vous voulez.

(Louis entre sur scène)

Molière :  

Vous voilà enfin Louis, nous allons pouvoir commencer.

(En s’adressant au Médecin)

Je vous présente Louis, il joue le personnage de Géronte.

Le Médecin :

Oui, j’avais deviné.

(En s’adressant discrètement à Lucinde)

La saignée ou la purge…pensez-y.

NOIR

Musique :

ACTE II

Personnages : Molière, le Médecin, Catherine, Louis

Musique :

(Le rideau se lève, tous les personnages sont sur scène)

Molière :

A présent nous allons répéter avec le Médecin les scènes II et IV de l’acte II.

Commençons par la scène II qui met en scène Géronte et Sganarelle.

Justeau moment où Sganarelle rencontre Géronte.

(En s’adressant au Médecin) Vous jouez Sganarelle.

(Molière prend une feuille et une plume et se tient prêt à prendre des notes)

On y va !

Géronte :

Monsieur, je suis ravi de vous voir

Molière :

On suppose que Sganarelle a une très belle tenue

(En s’adressant au Médecin)

C’est à vous, soyez bon ! 

Le Médecin :

Soyez bon, soyez bon, facile à dire !

Heu…… Comment il va le Géronte , il a la patate ?

Molière :

Non, non…ça ne va pas.

Je vous rappelle qu’il vient pour sa fille, pas pour lui.

De plus, comme c’est un faux médecin, il doit faire attention à ne pas se faire démasquer.

Il doit donc être un peu moins bourru

Le Médecin :

(Etonné)

Bourru !! Moi Bourru ?

Molière :

Un peu moins naturel, si vous préférez.

Il doit impressionner Géronte.

Le Médecin :

En citant Hippocrate par exemple, que c’est un grand homme…et patati et patata…

Molière :

(En notant)

C’est beaucoup mieux, vous voyez quand vous voulez

Le Médecin :

Ce n’est pas facile pour moi de jouer le rôle de Trapadelle.

Molière :

(Irrité)

Sganarelle, il s’appelle Sganarelle

Bien, passons à la scène IV de l’acte II.

Sganarelle rencontre Lucinde

(Lucinde vient sur le devant de la scène)

(Molière en s’adressant au Médecin)

C’est à vous.

Le Médecin :

Qu’est ce qui lui arrive à la heu…pardon je reprends…

(En articulant et en faisant de grands gestes

Qu’avez-vous donc ? De quel mal souffrez-vous chère petite ?

Dites-moi tout afin que je puisse vous guérir prestement !

Lucinde :

(Elle fait des signes, montre sa bouche)

Hi, han, Hum…

Le Médecin :

(Toujours en sur jouant)

Pardon ? Pouvez-vous répéter, je n’ai point compris votre réponse

Lucinde :

Hi, han, hum…

Le Médecin :

(S’adressant à Molière)

Je veux bien faire des efforts, mais faudrait qu’elle en fasse aussi.

Je ne comprends rien à ce qu’elle dit.

Vous pourriez articuler !

Lucinde :

Mais je ne fais que jouer mon rôle, ces répliques sont les miennes et je ne peux m’exprimer plus clairement.

Je ne dois en dire plus dans cette scène.

Le Médecin :

Vous n’avez pas dû passer trop de temps à apprendre vos répliques !

(En s’adressant à Molière)

Vous auriez pu faire un effort pour ce personnage !

C’est un peu limité comme dialogue non ?

Lucinde :

Je vous rappelle que dans cette scène je suis muette, donc je ne peux vous répondre autrement !

Le Médecin :

Oups ! C’est vrai, j’avais oublié.

Je poursuis.

(En s’adressant à Géronte et en articulant à nouveau)

Votre fille ne peut pas parler car elle est muette

Géronte :

Et pour quelle raison ?

(Molière prend des notes)

Le Médecin :

Comme le dit Aristote votre fille est muette car elle ne possède plus l’action de sa langue…et toc !

Géronte : 

Mais encore, vos sentiments sur cet empêchement de l’action de la langue.

Le Médecin :

Il existe deux raisons qui peuvent causer cela.

Le syndrome de la carpus ou celui de la tombus.

Muettus comme une carpus ou muettus comme une tombus c’est mon diagnostic.

Molière :

Vous commencez à rentrer dans le personnage, continuez…

Le Médecin :

Ca commence à m’amuser de raconter n’importe quoi.

Molière :

Il faut dire qu’en tant que Médecin vous avez une certaine expérience de la chose.

On continue (Il reprend ses notes)

Géronte :

Mais Monsieur, que croyez-vous qu’il faille faire à cette maladie ?

Le Médecin :

Mon avis et qu’on la remette sur son lit et qu’on lui donne comme remède heu…du pain trempé dans du vin.

Géronte :

Pourquoi cela, Monsieur ?

Le Médecin :

Parce qu’il y a dans le vin et le pain mêlés ensemble, une vertu sympathique qui fait parler.

C’est d’ailleurs ce que l’on donne aux perroquets pour qu’ils apprennent à parler.

Géronte :

Vite quantité de pain et de vin alors !

Le Médecin :

Je reviendrai voir Lucinde ce soir.

(En s’adressant à Molière avec fierté)

Et voilà, hop … la Lucinde, c’est réglé.

Molière :

(En finissant de noter)

C’est parfait j’ai tout noté

Le Médecin :

Ça commence à me plaire de jouer le rôle de Vermicelle

Molière :

(En levant les yeux au ciel)

Je renonce.

Vous m’avez été très utile. Nous allons pouvoir à présent répéter toute la pièce.

Je ne voudrais pas accaparer tout votre temps, je vous libère, vous avez certainement des malades à duper heu…à soigner je veux dire

Merci pour tout.

Le Médecin :

Avant de me retirer, j’aimerais bien connaître la fin de l’histoire

Molière :

Je vais vous la révéler, mais je vous demande de la garder pour vous.

Il en va du succès de la pièce.

Le Médecin :

Il peut compter sur moi le Molière, sur la tête d’Hippocrate, je serai comme Lucinde…muet

Molière :

A la fin, Lucinde retrouve la parole qu’elle n’avait jamais perdue, elle épousera celui qu’elle voulait, c’est-à-dire Léandre et Sganarelle repartira avec son épouse Martine.

Le Médecin :

Vous en avez de l’imagination pour arriver à écrire une histoire autour de ce Caramel en faux médecin.

Molière :

De l’imagination j’en ai, mais de la patience, beaucoup moins.

Le faux médecin se nomme SGA NA RELLE.

Avant que vous ne partiez, j’aimerais vous entendre prononcer au moins une fois correctement son nom.

Le Médecin :

Sganarelle, c’est ce que j’ai dit non ?

Molière :

Enfin, vous voyez c’est pourtant simple.

Le Médecin :

(Avant de sortir)

Un dernier petit conseil avant que je retourne auprès du Louis, vous devriez quand même à l’avenir utiliser des prénoms plus simples pour vos personnages, comme Jean par exemple c’est beaucoup plus facile à retenir que Snagarelle.

(Il sort)

NOIR

Musique :

ACTE III

DECOR :

La chambre royale : un lit, un fauteuil, une table, un miroir,

PERSONNAGES : 

Le Roi Louis XIV, Le Valet, Le Médecin, Le Barbier, La Servante, Le Grand Maître de la Garde-Robe

MUSIQUE :

(Le Roi est dans son lit, il dort, il a un bonnet de nuit sur la tête, le valet entre avec une sonnette et l’agite, il s’approche du lit)

LE VALET :

(En murmurant)

Sire, voilà l’heure…

LE ROI :

(En se réveillant et s’étirant)

En voilà une heure pour me réveiller…

LE VALET :

(Se rapprochant du Roi)

Votre Altesse n’a pas oublié ?

LE ROI :

 (En se grattant la tête)

Oublié quoi ?

LE VALET :

Eh bien aujourd’hui est un jour spécial…

LE ROI :

Spécial en quoi ?  

LE VALET :

C’est le jour du bain…

LE ROI :

Déjà… vous êtes sûr ?

LE VALET :

Oui le dernier c’était…il y a 6 mois…d’ailleurs cela commence à se voir… et à se sentir…(En balayant sa main devant son nez)

LE ROI :

Pour le bain on verra plus tard…

(Il s’assoit au bord du lit le valet lui met ses chaussons aux pieds)

Je ne suis pas sûr que cela soit bien nécessaire

(En se sentant sous les bras)

Je pense qu’il y a des choses plus importantes à faire aujourd’hui…

(Il se lève et va s’asseoir sur son fauteuil…)

LE VALET :

(En ôtant le bonnet de nuit et en mettant la perruque au roi)

Si son altesse ne prend pas son bain aujourd’hui…la reine ne va pas être contente…c’est elle qui a insisté pour le bain…

LE ROI :

(En se regardant dans le miroir)

La Reine, la Reine…je m’en accommoderai… après tout ce n’est pas elle qui décide ici…c’est quand même moi le roi…

LE VALET :

(D’un air pas convaincu)

C’est son altesse qui décide mais je vous aurai prévenu.

(il sort)

LE MEDECIN :

(Entrant dans la chambre)

Mes hommages du matin Louis

LE ROI :

Vous arrivez à point nommé…

LE MEDECIN :

(S’approchant du roi pour l’examiner)

Je suis toujours là quand il faut c’est ce qui me rend indispensable.

Alors comment il va le Louis ce matin ?

Il est en forme ?

Il a passé une bonne nuit ?

LE ROI :

La nuit a été bonne…bien qu’un peu courte…Il va bien, il se sent très bien…quoiqu’un peu contrarié…

LE MEDECIN :

Tant mieux s’il a bien dormi…comme je lui dis toujours, pour la récupération, le plus précieux c’est quand le Louis dort

(Il commence à l’examiner, il regarde ses oreilles)

Il va bien, il va bien… c’est à moi de le dire ça…voyons voir comment va l’ouïe

LE ROI :

(Etonné)

Mais il va bien…il vient de vous le dire !

LE MEDECIN :

Certes Louis…mais l’ouïe est-elle bonne ?

LE ROI :

Plait-il ?

LE MEDECIN :

Oui, l’ouïe de Louis !

(Il lui crie dans l’oreille)  

Un, deux, trois…un, deux, trois  

LE ROI :

(En se reculant)

Mais ne criait pas comme ça, Louis n’est pas sourd !

LE MEDECIN :

Il n’est pas sourd, il n’est pas sourd… en est-il sûr ?

LE ROI :

(En haussant le ton)

Il n’est pas sourd, il en est sûr et vous vous êtes lourd !

LE MEDECIN :

Arrêtez de crier comme ça, ce n’est pas bon pour votre cœur et en plus je ne peux rien voir quand Louis braille

(Il lui fait ouvrir la bouche et regarde ses dents)

Il se sent bien… il se sent bien…(En balayant sa main devant son nez) il sent bien en tout cas

A quand remonte son dernier bain ?

LE ROI :

Vous aussi…décidément vous avez tous ce mot à la bouche aujourd’hui…vous n’auriez pas vu la reine avant de venir par hasard ?

LE MEDECIN :

La Marie Thérèse…Non pourquoi ?

LE ROI :

La reine voudrait que je prenne mon bain aujourd’hui alors que j’en ai déjà pris un il y a, à peine 6 mo…heu quelques semaines… l’idée est plutôt saugrenue vous ne trouvez pas ? … d’ailleurs je compte sur vous pour lui expliquer que le bain c’est mauvais pour la santé

LE MEDECIN :

(Embarrassé)

Le bain n’est peut-être pas une si mauvaise idée…cela redonnerait un bon coup d’éclat à notre bon roi soleil…

LE ROI :

Et ma santé ? Vous le médecin, vous y pensez à ma santé ?…Ce n’est pas moi qui vais vous apprendre que l’eau transporte toutes sortes de microbes et de maladies mortelles qui peuvent passer à travers les pores de la peau…vous voulez ma mort où quoi ?

LE MEDECIN :

Certes,… mais un tout petit bain juste pour faire disparaître cette odeur désagréable qui l’entoure et soulager également sa cour…cela ne peut pas lui faire de mal au Louis.

LE ROI :

Quelle odeur ? (En se sentant les bras, les mains) Je ne sens rien moi…

LE MEDECIN :

Rien ? Vraiment il ne sent rien ? Il est peut-être enrhumé ou bien couve-t-il une grippe ?

Il a peut-être besoin d’une petite saignée…

LE ROI :

Attendez (il agite les bras et sent l’air), oui…peut-être…mais si peu…un petit coup de parfum et cela n’y paraîtra plus…tranquille pour quelques mois encore.

Voilà une affaire de réglée.

En tant que premier médecin du royaume, je vous laisse le soin d’aller expliquer cela à la reine…

LE MEDECIN :

Très bien Louis… j’espère arriver à la convaincre la Marie Thérèse… mais…je le sens mal…

LE ROI :

(Agacé)

C’est bizarre tout de même !

Qu’avez-vous donc avec les odeurs aujourd’hui !

LE MEDECIN :

Bizarre, vous avez dit bizarre ?

LE ROI 

Moi, j’ai dit bizarre, comme c’est étrange ! Pourquoi aurais-je dit bizarre ?

LE MEDECIN :

Je vous assure mon cher Louis, que vous avez dit bizarre,

LE ROI :

Moi, j’ai dit bizarre, comme c’est bizarre !

LE MEDECIN :

(Il lui touche l’estomac)

Et là, est-ce que ça vous chatouille, ou est-ce que ça vous gratouille ?

LE ROI :

Ni l’un, ni l’autre

LE MEDECIN :

Bien… Louis…Jouvet, heu… j’y vais.

LE ROI :

N’oubliez pas d’aller voir la Reine et soyez convaincant pour une fois.

(Le Médecin sort)

LE BARBIER :

(Rentre avec un peigne et un ciseau à la main)

C’est l’heure de coiffer votre Majesté

LE ROI :

(Contrarié)

Faites donc votre besogne, et appliquez-vous…

LE BARBIER :

On coiffe comme d’habitude, au-dessus tout dans le volume et sur les côtés un léger dégradé avec de petites mèches…la coupe solaire quoi…

LE ROI :

Oui c’est ça quelque chose qui en impose et que l’on voit de loin…qui me ressemble quoi

LE BARBIER :

(En coiffant le roi il se met à grimacer et à sentir l’air puis la tête du roi)

Vous ne trouvez pas que ça sent bizarre ici ?

LE ROI :

(En colère)

Stop ! Vous n’allez pas vous y mettre vous aussi, coiffez-moi en silence pour une fois…j’ai besoin de réfléchir…et n’oubliez pas le parfum.

LE BARBIER

(Tout en continuant de coiffer le roi)

C’est une belle journée qui s’annonce…ensoleillée…radieuse…comme vous sire…Afin de mieux en profiter voulez-vous que j’ouvre les fenêtres ?

LE ROI :

Pas avant d’en avoir fini avec ma coiffure

LE BARBIER :

(Laissant tomber peigne et ciseau)

Ça y est, j’ai fini

(Il court vers la fenêtre, l’ouvre et respire pleinement l’air extérieur)

LA SERVANTE :

(Rentre avec un plateau et un bol)

Le déjeuner de votre majesté est servi…si votre majesté veut bien prendre la peine (Elle pose le plateau devant le Roi)

(Elle voit le barbier à la fenêtre et s’adresse à lui)

Mais que faites-vous devant cette fenêtre ?

Vous n’allez pas sauter tout de même…

(Le roi prend le bol et commence à boire)

LE BARBIER :

Non rassurez-vous, je prends juste un bain… de soleil…

LE ROI :

(Le roi fait mine de s’étouffer et repose le bol)

Mais je suis victime d’un complot… (s’adressant au barbier) sortez où c’est moi qui vous passe par la fenêtre…

LE BARBIER :

(Etonné et craintif)

Mais qu’est-ce que j’ai encore dit ?

LA SERVANTE :

Ah non, ne faites pas ça sire… car après c’est moi qui nettoie la cour…à propos de nettoyage…il faudrait peut-être que je m’occupe de la chambre de votre altesse…ça sent le renfermé là-dedans… (s’adressant au barbier) vous ne trouvez pas…

LE BARBIER :

(En sortant)

 Heu …non, non…

LA SERVANTE :

Pour le dîner votre altesse a-t-elle une préférence ?

Que j’en informe les cuisines.

(Elle reste sur scène et attend)

LE GRAND-MAITRE DE LA GARDE-ROBE :

(Il entre avec des vêtements sur le bras)

Sire mes hommages du matin, j’ai pensé que pour aujourd’hui un petit justaucorps à brevet irait très bien avec cette journée.

LE ROI :

Ne craignez-vous pas que cela soit un peu fade comme tenue ?

LE GRAND-MAITRE DE LA GARDE-ROBE :

Non, il est rehaussé d’or et d’argent (il montre l’habit au Roi) regardez la finesse des broderies, c’est très tendance à la Cour d’Espagne et c’est d’une élégance, la reine va a-do-rer.

LE ROI :

Si cela plait à la Reine alors, il ne faut pas hésiter, n’oubliez pas d’ajouter une bonne dose de parfum sur mes vêtements, (il regarde la servante) car il parait qu’il y a une drôle d’odeur ici, vous trouvez vous ?

LE GRAND-MAÎTRE DE LA GARDE-ROBE :

Je ne sens rien, j’ai le nez bouché depuis hier, ce palais est un véritable courant d’air !

LA SERVANTE :

(Gênée et pressée de sortir de la chambre)

Heu…pour le dîner, une idée ?

LE ROI :

(Songeur à haute voix)

Que cela m’arrangerait si son nez pouvait être bouché, à la Reine. 

LA SERVANTE :

(Soulagée) Des bouchées à la reine pour le dîner, c’est parti (elle sort)

LE ROI :

Bien, passons ce justaucorps, qu’on en finisse, j’ai une journée chargée qui m’attend…

NOIR

Musique :

ACTE IV

DECOR :

 LE CABINET DE TRAVAIL : une table, un fauteuil, des chaises

PERSONNAGES :

LE ROI, VAUBAN ingénieur militaire, De LOUVOIS secrétaire d’état à la guerre, COLBERT contrôleur des Finances, LE MEDECIN, LA REINE

MUSIQUE :

(Le Roi est déjà sur scène assis sur son fauteuil, DE LOUVOIS entre)

LE ROI :

Ah mon bon DE LOUVOIS, il faudrait que vous m’organisiez prestement, une bonne petite guerre

DE LOUVOIS :

Une guerre ? Et pour quand vous la faudrait-il ?

LE ROI :

Pour aujourd’hui même, j’ai besoin de m’éloigner du palais durant quelques jours

DE LOUVOIS :

Vous, vous êtes disputé avec la Reine

LE ROI :

Pas du tout, j’ai juste besoin de changer d’air et d’un peu d’exercice

DE LOUVOIS :

(Pas convaincu)

C’est cela oui, je comprends. Mais vous trouver une guerre pour aujourd’hui, cela risque d’être difficile.

LE ROI :

Enfin, cela ne doit pas être trop difficile à trouver, il y a bien quelqu’un qui ne nous aime pas.

DE LOUVOIS :

(Il réfléchit)

Il faut que je regarde…

COLBERT :

(Rentre)

Vous voilà bien sérieux, sommes-nous attaqués ?

DE LOUVOIS :

Non, et c’est bien ça le problème.

COLBERT :

(Étonné)

Je ne comprends pas ?

DE LOUVOIS :

(A voix basse, en s’adressant à COLBERT)

C’est la Reine, ils se sont disputés,

(Puis reprenant sa voix normale)

Sa majesté souhaiterait faire une guerre aujourd’hui même…

COLBERT :

Les finances du royaume n’étant pas au beau fixe, puis-je suggérer une petite partie de chasse à la place…cela éloigne du palais sa Majesté mais c’est beaucoup plus économique qu’une guerre

LE ROI:

Pas assez long comme éloignement COLBERT, et pour les finances du palais, vous n’avez qu’à inventer un nouvel impôt.