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Parole à ma Plume

Synopsis :

Raphael doit inventer une poésie, pas trop inspiré, il va avoir une aide inattendue, celle de sa plume. Un petit voyage en poésie.

Personnages :

Raphael, La mère, Plume, Ronsard, Verlaine, Rimbaud, D’Arbouville, Lamartine, Apollinaire, Hugo

Décors : Une table ou un bureau, une chaise, un ordinateur portable

Pièce en un acte

ACTE I

SCENE I

Un Enfant entre sur scène avec son cartable, il s’assoit, ouvre son cartable, sort son cahier de texte, sa trousse, et des feuilles ou un cahier.

Il ouvre son cahier de texte et lit, puis prend un stylo et réfléchi devant sa feuille ou son cahier.

Sa mère entre à son tour sur scène, en voyant son fils.

La Mère :

Tiens tu es déjà là ?

Raphaël :

Oui, j’ai fini plus tôt, le professeur de Théâtre était absent.

La Mère :

Tu as goûté ?

Raphaël :

Non, je vais faire mes devoirs d’abord, je gouterai après.

La Mère :

Très bien. Tu as beaucoup de devoirs ?

Raphaël :

J’ai du français, je dois inventer une poésie.

La Mère :

C’est intéressant.

Raphaël :

C’est vite dit, ça ne m’inspire pas trop.

La Mère :

Je dois aller faire des courses pour ce soir.

Travaille bien.

(En sortant de scène.)

Si tu n’es pas trop inspiré, tu n’as qu’à laisser la parole à ta plume.

Raphael seul sur scène réfléchit

Voix Off :

Elle à raison ta mère. Je peux t’aider.

Raphaël :

(En sursautant)

Qui me parle ? Où êtes-vous ?

Voix Off :

C’est moi ta plume.

Raphaël :

Ma plume ?!, Quelle plume ? Je n’ai pas de plume moi, je ne suis pas un poulet !

Voix Off :

Ta plume, ton stylo si tu préfères. Tu es beaucoup trop jeune pour avoir connu la plume, mais autrefois pour écrire on utilisait une plume d’oie, le stylo n’existait pas.

Raphaël :

(En regardant son stylo)

On écrivait avec une oie ? Ça ne devait pas être très pratique !

Elles se laissaient faire les oies ?

Voix Off :

Il ne s’agissait que d’une plume, pas de l’oie toute entière heureusement.

Tu t’appelles comment ?

Raphaël :

Raphael, mais tout le monde m’appelle Raff.

Voix Off :

C’est quoi le sujet de ton devoir Raff ?

Raphaël :

Je dois faire une poésie.

Voix Off :

Vaste sujet !   

Commençons par le début.

Connais-tu des poètes Raff ?

Raphaël :

Des poètes ? Heu…pas trop non.

Voix Off :

Ronsard, Verlaine, Aragon ?

Cela ne te dit rien ?

Raphaël :  

Heu non.

Voix Off :

Rimbaud, Prévert, Hugo non plus ?!

Raphaël :

Hugo ? Victor Hugo ?

Voix Off :

Oui c’est ça. Tu en connais déjà un, c’est déjà bien.

Raphaël :

Victor Hugo je connais oui. C’est la station de métro ou je descends pour prendre mon bus. Mais je ne vois pas le rapport avec mon devoir de Français.

Voix Off :

Je vois. Et la poésie, tu en connais ? Tu as dû en apprendre à l’école ?

Raphaël :

Oui mais je les apprends et ensuite je les oublie.

Voix Off :

Tu n’aimes pas la poésie ?

Raphaël :

Je préfère le rap, c’est mieux.

Voix Off :

Mais le rap peut parfois être de la poésie. La poésie se présente sous différentes formes. Qu’il soit lu ou chanté, si un texte écrit en vers, provoque de l’émotion alors c’est de la poésie.

Raphaël :

Alors moi, je serai un poète quand je serai grand.

Voix Off :

Vraiment, Tu veux faire quoi lorsque tu seras grand ?

Raphaël :

Je veux être chanteur de rap et mixer de la musique.

Voix Off :  

Mixer de la musique ? Ça veut dire quoi  ?

Raphaël :

Mixer de la musique, c’est mélanger des musiques pour en créer de nouvelles. Comme font les DJ.

DJ Snake, David Guetta, Martin Solveig, cela ne te dit rien ?

Voix Off :

Heu non

Raphaël :

Avincii, Bob Sinclar, Laurent Wolf ?

Voix Off :

Non plus.

Raphaël :

Je vois. Et la musique, tu connais ? Tu en as déjà écouté ?

Voix Off :

Oui mais je les écoute et ensuite je les oublie.

Raphaël :

Tu n’aimes pas la musique ?

Voix Off :

Je préfère les livres et la poésie.

Raphaël :

Moi j’adore la musique, c’est pour cela que je serai DJ. Je serai DJ Raff

Voix Off :

DJ Raff ! Tu en es sûr ?

Moi cela me fait plus penser au mammifère qui vit dans la savane qu’a de la musique. Tu devrais peut-être songer à changer de nom.

Mais revenons au sujet de ton devoir si tu le veux bien.

Raphaël :

D’accord.

Voix Off :

Commence par allumer ton ordinateur s’il te plait.

Raphaël :

Très bien.

(En allumant l’ordinateur)

Tu veux qu’on joue à Fortnite ?

Voix Off :

Fornite, c’est quoi ?

Raphaël :  

C’est un jeu vidéo, un battle royal.

Voix Off :

Battle Royal ?

Ca veut dire quoi ?

Raphaël :  

C’est un jeu ou 100 joueurs sautent d’un bus volant sur une île.

Une fois sur l’île, c’est chacun pour soit, tu dois essayer de tuer les autres joueurs.

Si tu es le dernier survivant, tu gagnes un parapluie et un sticker.

Voix Off :

Tu sautes d’un bus volant et tu dois éliminer tes adversaires pour gagner un parapluie et un sticker ?!!

Et ça te plait comme jeu ?

Raphaël :

Oui je peux y jouer des heures avec mes copains.

Tu peux même gagner des danses.

Voix Off :

Des danses ?

Raphaël :

Oui comme celle de « T’as perdu »

(Raphaël se met à danser)

Voix Off :

Intéressant, mais nous sommes loin de la poésie.

Raphaël :

Peut-être, mais c’est plus amusant.

Voix Off :

Bien, tu joueras après avoir fait tes devoirs, si tu as le temps et si ta mère le veut bien.

Raphaël :

Tu parles comme elle.

Voix Off :

A présent, tape plume sur ton clavier et lance la recherche.

Raphaël :

(Il tape sur le clavier puis valide)

Plume voilà.

(Un côté de la scène s’éclaire et Plume apparait dans la lumière)

SCENE II

Plume :

Merci Raphael

(En faisant des mouvements d’assouplissement)

Ça fait du bien de se dégourdir un peu, je suis un peu à l’étroit dans ces ordinateurs.

Bien commençons. Tape le nom de Ronsard.

Raphaël :

Ron sard, c’est parti.

(Apparait au côté de Plume ou dans un autre endroit de la scène qui s’éclaire, Ronsard)

Plume :

Raphael, je te présente Pierre de Ronsard, poète du XVIème siècle.

Tu en as peut-être déjà entendu parler ?

Raphaël :

Non, moi je connais Pierre Richard le comédien, mais pas Monsieur Pierre de Ronsard.

Ronsard :

Bonjour, Raphael. Ainsi tu n’as jamais entendu parler de moi, peut-être as-tu lu ou même appris une de mes poésies ?

Raphaël :

Heu…Non, je ne crois pas…ou alors je ne m’en souviens plu.

Ronsard :

« Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie », cela ne te dit rien ?

Raphaël :  

Heu… non.

Ronsard :

Et « Mignonne allons voir si la rose, qui ce matin avait déclose »

Non plus ?

Raphaël :

Non, en même temps, moi je ne suis pas trop fleurs, je préfère les bonbons.

Ronsard :

Moi aussi j’aime les bonbons.

En fait il ne s’agit pas de poèmes sur les fleurs, mais sur l’amour et le temps qui passe, vite, trop vite.

« Vivez, si m’en croyez, n’attendez à demain

Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie.

Cueillez, cueillez votre jeunesse :
Comme à cette fleur, la vieillesse
Fera ternir votre beauté. »

Je suis conscient que vu ton jeune âge ces thèmes ne t’évoquent rien.

Mais j’espère qu’un jour tu découvriras ces poèmes et que tu en apprécieras le sens.

Plume :

J’en suis convaincue.

Merci Ronsard pour ces quelques vers enchanteurs.

Bien à présent, je voudrais que tu tape Verlaine.

Raphaël :

Verlaine

(La lumière s’éteint sur Ronsard puis se rallume, il y a Verlaine à la place de Ronsard)

SCENE III

Plume :

Raphael je te présente Paul Verlaine, poète du XIXème siècle.

Raphaël :

Et vous aussi vous écrivez sur les fleurs pour parler du temps qui passe ?

Verlaine :

Pour parler du temps qui passe j’ai écrit un poème que tu connais peut-être, qui s’intitule « Chanson d’automne ».

Raphaël :

Chanson d’automne…chanson d’automne oui peut-être. Pouvez-vous me le dire, peut-être que ça va m’aider à me souvenir.

Verlaine :

Mais bien sûr :

Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon coeur
D’une langueur
Monotone.

Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l’heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure

Et je m’en vais
Au vent mauvais
Qui m’emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.

Raphaël :

Oui je le connais ce poème, avec les violons qui pleurent et les feuilles mortes.

Je ne savais pas que cela parlait du temps qui passe.

Verlaine :

Ce poème exprime toute ma mélancolie face au temps qui passe.

Raphaël :

C’est curieux, pour parler de la même chose, les poètes n’emploient pas les mêmes mots.

Pour souligner le temps qui passe, Ronsard, parle de fleurs et vous de l’automne.

Verlaine :

Tu as raison Raphael, et c’est justement ça qui fait la richesse de la poésie.

Pour évoquer un même thème, chaque poète utilise ses propres mots, ses propres images, ses propres sentiments, ses propres émotions. C’est ce qui rend le poète et son œuvre unique.

Ronsard utilise les roses, moi l’automne, peut-être que toi pour évoquer le temps qui passe tu parlerais de tout autre chose ?

Raphaël :

Moi si je devais faire une poésie sur le temps qui passe, je parlerais d’une montre, ce serait beaucoup plus simple.

Verlaine :

Mais pourquoi pas, peut-être que dans quelques années nous pourrons lire un poème de Raphael qui parle d’une montre.

Les roses, l’automne, une montre, ceux sont des métaphores, on en utilise beaucoup en poésie.

Raphaël :

Des quoi ?

Verlaine :

La métaphore, est une figure de style qui consiste à remplacer une notion abstraite par une autre plus concrète.

Raphaêl :

(En se frottant la tête comme pour essayer de comprendre)

Je n’ai toujours pas compris ce que c’était.

Verlaine :

C’est une image que l’on donne pour mieux visualiser une notion abstraite.

Par exemple Charles Baudelaire a écrit :

« Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage »

Il utilise la métaphore ténébreux orage, pour souligner combien sa jeunesse a été triste et tourmentée, notion abstraite.

Tu comprends mieux ?

Raphaël :

Oui, c’est clair comme de l’eau de roche.

Plume :

Merci Verlaine, à présent, Raphael, passons à Rimbaud.

Raphaël :

Rambo, le film avec Sylvester Stallone ?

Plume :

Non Rimbaud, R  I  M  B  A  U  D Arthur de son prénom et poète du XIXème siècle.

Raphaël :

Ah dommage, parce que Rambo je connaissais, je les ai tous vu.

(Il tape sur son clavier)

Rimbaud

(La lumière s’éteint sur Verlaine puis se rallume sur Rimbaud)

SCENE IV

Raphaël :

(En découvrant Rimbaud)

Effectivement, vous n’avez rien à voir avec Rambo, vous ne lui ressemblez pas du tout.

Rimbaud :

Rambo, de qui s’agit-il ?

Raphaël :

C’est un soldat américain qui a fait la guerre du Vietnam.

Rimbaud :

Un soldat, la guerre ? Je ne connais pas ce Rambo, mais toi connais-tu mon poème intitulé « Le dormeur du val » ?

Raphaël :

Non, je devrais ?

Rimbaud :

Il s’agit du portrait d’un soldat durant la guerre tout comme ton Rambo.

Raphaël :

Pourquoi il s’appelle « Le dormeur du Val » ? C’est un soldat qui a toujours sommeil ?

Rimbaud :

Absolument pas, en fait, il ne dort pas, la cruauté de la guerre lui a ôté la vie.

C’est un poème que j’ai écrit en 1870, j’étais un tout petit peu plus vieux que toi, j’avais 16 ans.

A travers ce poème je dénonçais l’absurdité de la guerre franco prussienne qui faisait rage. Force est de constater que presque 150 ans après, cette absurdité existe toujours. 

Raphaël :

Tu peux me le dire ton poème ? S’il te plait ?

Rimbaud :

Je vais essayer de m’en souvenir :

C’est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit

Raphaël :

La fin de ton poème est triste

Rimbaud :

Mais la guerre l’est tout autant

Un poème n’est pas forcément joyeux, c’est son auteur qui choisit s’il veut qu’il soit gai, sérieux ou triste cela dépend du sujet traité.

L’auteur doit être libre de pouvoir exprimer à travers ses mots ce qui l’a envie de dire.

C’est ce que l’on appelle la liberté d’expression.

Malheureusement, cette liberté d’expression n’existe pas partout.

Raphaël :

Tu veux dire qu’aujourd’hui il y a des gens qui ne peuvent pas dire ou écrire ce qu’ils ont envie ?

Rimbaud :

Absolument Raphael.