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Une Petite Historiette

Synopsis :

Une adaptation d’une correspondance de Mme de Sévigné à Mr de Pomponne concernant une petite anecdote royale.

Personnages :

Mme de Sévigné, Guillemette, Le Roi, Theresa, Blase, Dangeau, Saint Aignan, Le maréchal de Gramont.

Décors :

Table, chaises

Pièce en 4 actes       Durée : 20 minutes

ACTE I

(Sur scène Mme de Sévigné est assise, elle lit un livre. La Servante Guillemette entre sur scène

Musique : Historiette Joseph Bloch

Guillemette :

Quel froid ! Il fait un vent à décorner les bœufs !

Je me demande comment vous faites pour supporter ce temps.

Ce mistral me rend folle !

Mme de Sévigné :

C’est grâce à lui si nous pouvons profiter du soleil Guillemette.

C’est quand même mieux que la grisaille.

De plus l’été il rafraîchit et diffuse les doux effluves de lavande et de thym.

Guillemette :

Le seul avantage que je lui trouve, c’est qu’avec lui, le linge sèche très rapidement.

Mme de Sévigné :

Vous voyez, il y a des avantages à venir séjourner chez ma fille à Grignan.

Moi j’adore me promener au milieu des oliviers baignés de soleil.

Ecouter le chant des cigales qui accompagne les chaudes journées d’été.

Lorsque le temps sera plus clément, je vous invite à vous promener sur les belles terrasses du château afin d’y contempler des vues admirables, comme celle du Mont Ventoux par exemple.

La Provence a beaucoup de charme Guillemette.

Guillemette : 

Moi je préfère la grisaille parisienne au vent provençal !

Mont Ventoux, Mont venteux plutôt !

Mme de Sévigné :

Une chose est sûre, vous ne pourrez jamais travailler à la Cour du Roi.

Guillemette :

Ah bon ! Pourquoi dites-vous cela ?

Vous ne m’en croyez pas capable ?

Mme de Sévigné :

Le problème Guillemette ce n’est pas vos compétences mais votre franchise.

Guillemette :

Ma franchise ? Je ne comprends pas !

Mme de Sévigné :

Sachez qu’à la Cour de Versailles, si on veut y rester, il faut toujours dire ce que le Roi veut entendre.

Donc la plupart du temps, mieux vaut ne pas dire ce que l’on pense.

Guillemette :

Vous avez raison ce n’est pas pour moi.

Moi je dis toujours ce que je pense, que ça plaise ou non.

Mais au moins je suis sincère.

Mme de Sévigné :

Rassurez-vous, votre franchise me convient parfaitement.

Apportez-moi de quoi écrire, j’ai une petite historiette à relater à M. de Pomponne.

Tout en l’écrivant, je vais vous la conter.

Je la trouve assez drôle et montre à quel point la flatterie détourne la vérité à la Cour.

Guillemette :

Je veux bien, je serai bien mieux ici au chaud avec vous que dehors avec ce vent.

(Elle lui apporte une plume et du papier)

Mme de Sévigné :

Merci Guillemette, asseyez-vous.

NOIR

Musique :

ACTE II

(Le Roi est sur scène avec Theresa la cuisinière)

Le Roi :

Theresa, aimez-vous les vers ?

Theresa :

Les vers votre Majesté ? Mais je l’ignore, je n’en ai encore jamais mangé !

Je laisse ce plaisir aux oiseaux.

Le Roi :

Ce n’est pas de ces vers là dont je veux parler, mais des vers de poésies, des rimes et autres alexandrins.

Theresa :

Ah ceux-là, je les apprécie oui !

Que votre altesse me pardonne du quiproquo, mais de par ma fonction de cuisinière du Roi, j’ai pensé à la nourriture et non à la poésie.

Le Roi :

Je vous comprends. Je rencontre parfois le même problème.

Nous sommes trop enfermés dans nos fonctions.

Vous c’est la cuisine, moi c’est le pouvoir.

Mais comme j’ai le pouvoir, je peux changer cela. Pourquoi ne pas m’essayer à la poésie après tout ?

Qu’en pensez-vous ?

Theresa :

(Surprise)  

Ce que j’en pense moi ?

Mais, c’est à moi que vous posez cette question ?

Le Roi :

A qui d’autre ? Il n’y a que vous et moi dans cette pièce ?

Alors ? Croyez-vous votre bon Roi capable d’écrire des poésies ?

Theresa : 

(Embarrassée)

Mais heu… je ne sais pas… je suppose que c’est difficile d’écrire des poésies et peut-être que vous n’avez pas le talent pour en faire…

Le Roi :

Pas le talent ? ! Je vous trouve bien insolente à l’égard de votre Roi !

Theresa :

Mais euh… pas le temps d’en faire voulais-je dire.

Que votre altesse me pardonne pour ce lapsus malvenu.

Je suis persuadée que vous êtes fort capable d’écrire de très beaux vers et faire de très jolies poésies.

Le Roi :                     

Je préfère ce genre de pensées !

Si vous souhaitez rester la cuisinière de votre Roi, ne l’oubliez surtout pas Thérèsa !

Sinon je me verrais obligé de me passer de vos services et de vous envoyer exercer vos talents de cuisinière loin de Versailles.

En Angleterre par exemple, à cuisiner de la panse de brebis farcie pour Charles II.

Theresa :

Mais soyez certain que j’y penserai à l’avenir.

Je ne veux surtout pas aller en Angleterre.

Le Roi :

Je l’espère Theresa, je l’espère.

Allez donc dire à messieurs Dangeau et Saint Aignan que je souhaite les rencontrer.

Theresa :

Mais bien sûr, j’y vais de ce pas.

Le Roi :

Et cessez donc de mettre des « mais » dans toutes vos phrases, cela devient pénible.

Theresa :

Mais, je ne le fais pas exprès

Le Roi :

Vous persistez, décidément vous n’avez que faire de mes conseils !

Theresa :

Mais non pas du tout ! Vos conseils me sont très précieux.

Je ne voulais pas dire « mais », pardon !

Mais c’est plus fort que moi !

Oh non encore, je n’y arriverai pas !

Le Roi :

La patience de votre Roi aussi grande soit-elle à des limites.

Attention au « mais » de trop Theresa.

Theresa :

Que votre altesse se rassure, je vais faire très attention.

(Elle sort de scène)

Le Roi :

(Seul à voix haute)

Heureusement qu’elle est plus douée en cuisine qu’en flatterie, sinon je jeûnerais très souvent.

Cependant qu’elle se méfie, car Theresa « mais » pourrait se retrouver très bientôt en Angleterre.

(Il sonne pour appeler)

(Blase, son valet, entre sur scène)

Blase :

Vous m’avez demandé Sire ?

Le Roi :

Evidemment, que c’est moi qui vous ai appelé puisque vous êtes mon valet !

Blase :

Que puis-je faire pour son altesse ?

Le Roi :

Après avoir dû affronter l’insolence de Theresa, j’aurais besoin que vous me flattiez !

Blase :

Que je vous flatte !?

Le Roi :

Parfaitement, flattez-moi !

Blase :

Bin, euh… je sais pas… vous êtes le plus grand et le plus puissant des souverains.

Le Roi :

Ce n’est pas une flatterie ça, c’est la vérité !

Blase :

Quel idiot !

Le Roi :

Pardon ?

Blase :

Heu…Quel idiot, ai-je répondu, au valet du duc de Saint Simon qui affirmait que vous sentiez mauvais.

Non lui ai-je dit, notre Roi n’est pas sale et se lave régulièrement une fois par an et si malgré tout, il dégage parfois une odeur désagréable, c’est sûrement dû à ce qu’il a mangé la veille et…

Le Roi :

Etes-vous certain que ce soit une flatterie ?

Blase :

En fait, je pensais à autre chose mais je n’ose pas.

Le Roi :

Allez-y je vous écoute !

Blase :

Euh, voilà…votre altesse est très généreuse avec son peuple.

Le Roi :

Ah bon ?! Vous croyez ?

Blase :

Bin… je flatte !

Le Roi :

Puisqu’il en est ainsi, je vais doubler les impôts !

Merci mon bon Blase, vous pouvez disposer.

Blase :

Très bien Sire.

(Blase sort de scène et Theresa entre sur scène)

Theresa :

Votre altesse, messieurs Dangeau et Saint Aignan sont là !

Dois-je les faire venir ?

Le Roi :

Faites-les venir Theresa.

Je suis impatient de commencer.

(Theresa sort et Dangeau et Saint Aignan entrent sur scène)

Dangeau, Saint Aignan !

Je vous ai fait venir car j’aimerais que vous m’appreniez à faire des vers.

Dangeau :      

Euh… des vers Sire ?

Saint Aignan :

Pour… divertir ?

Le Roi :

Oui des vers afin d’écrire des poésies.

Dangeau :

Votre altesse souhaite écrire des poésies sur quel thème ?

Saint Aignan :

Oui c’est quels thèmes qu’elle aime, l’altesse souveraine ?

Le Roi :

Je n’y ai pas réfléchi, pourquoi cela a de l’importance ?

Dangeau :

Il est important d’utiliser,

Des vers appropriés,

Au sujet que l’on souhaite aborder.

Saint Aignan :

Les vers diffèrent selon l’affaire.

Pour une poésie sur la nature,

Nous utiliserons  des vers durs.

Dangeau :

Si vous souhaitez écrire une poésie effrayante,

Utiliser des vers glacés,

Il n’y a pas mieux pour frissonner.

Saint Aignan :

Et des verres d’eau,

Pour s’hydrater,

Lorsqu’il fait chaud.

Le Roi :

Je n’ai pas tout compris mais cela ne doit pas être trop compliqué pour un Roi.

Vous y arrivez bien vous !

Citez-moi quelques vers pour que je me rende compte.

Sur le thème de… (en réfléchissant)voyons euh… moi par exemple.

Quelques vers sur votre Roi, en voilà un excellent thème !

Dangeau :

Euh… En effet, très bon thème !

Comment n’y ai-je pas pensé moi-même !

Saint Aignan :

Pour aborder le thème du Roi Soleil, nous nous servirons bien évidemment, de vers luisants.

Le Roi :

C’est-à-dire ?

Dangeau :

Heu…par exemple :

Faire preuve d’un grand esprit

Pour le grand Roi Louis,

Faire des alexandrins

Pour notre souverain

Saint Aignan :

Rendre hommage à sa gloire,

Honorer sa mémoire

Le Roi :

C’est joli ça, j’aime bien !

Et en plus ce n’est pas faux !

Je vais essayer d’en faire aussi, mais il va falloir m’aider un peu pour commencer.

Dangeau :

Nous allons essayer de vous donner les clés pour réaliser des vers.

Saint Aignan :

Absolument, les clés des vers ou… ou comment ouvrir les portes de la poésie.

Le Roi :

C’est ça ouvrez-moi la première porte, vous qui en avez les clés.

Dangeau :

Pourquoi ne pas débuter votre poésie par ces mots:

Ceci est un hommage

A notre souverain

Saint Aignan :

La première porte est ouverte

 Il vous suffit d’en passer le seuil et de continuer.

D’enchainer les alexandrins.

Le Roi :

J’ai bien compris, mais avez-vous des idées afin d’aider votre Roi à trouver les clés ?

Dangeau :

Ce n’est pas aussi simple.

Il ne s’agit pas de courir dans un fort au milieu d’araignées, de serpents et de tigres pour trouver les clés.

Il vous faut attendre l’inspiration.

Saint Aignan :

Et trouver des mots qui se terminent par le son « age » et par le son « in » pour poursuivre la poésie.

Comme par exemple fromage ou boudin.

Le Roi :

Bien je vais essayer de poursuivre.

Une fois terminée, je vous la lirai pour avoir votre avis.

Dangeau : 

Mais avec plaisir Sire.